Pérou : Keiko Fujimori en tête du premier tour

Lima- Les Péruviens ont porté dimanche Keiko Fujimori, fille du controversé ex-président Alberto Fujimori, largement en tête du premier tour de l’élection présidentielle, au terme d’un scrutin calme malgré des attaques meurtrières de l’ex-guérilla maoïste.

La candidate de droite de 40 ans a raflé 37,8 à 39,1% des voix, selon deux sondages des instituts Ipsos et CPI, diffusés juste après la fermeture des bureaux de vote à 16H00 (21H00 GMT). 

Elle est loin devant les deux autres principaux candidats, l’économiste de droite Pedro Pablo Kuczynski (19,7 à 20,9% selon ces sondages) et la jeune parlementaire de gauche Veronika Mendoza (18,8 à 20,3%), au coude-à-coude pour participer au second tour le 5 juin. 

Les premiers résultats officiels sont attendus dans la nuit de dimanche à lundi. 

Le scrutin, où devaient participer 23 millions d’électeurs, s’est déroulé dans le calme malgré l’inquiétude suscitée par deux attaques samedi visant l’armée et attribuées par les autorités à des forces résiduelles du Sentier lumineux maoïste, ayant fait sept morts dans le centre du pays. 

“Le terrorisme et ceux qui s’allient à lui n’ont aucune place dans notre société et notre famille”, avait réagi le président péruvien Ollanta Humala (qui ne se représente pas), condamnant des “actes de démence”. 

Favorite depuis des mois et misant sur un ambitieux plan sécuritaire, Keiko Fujimori (Fuerza Popular) avait commencé la journée en cuisinant, devant les caméras de télévision, des saucisses pour le petit-déjeuner familial, avant d’afficher un grand sourire au moment de déposer son bulletin dans l’urne, dans le quartier cossu de Surco (sud de Lima). 

Son père Alberto Fujimori, président du Pérou de 1990 à 2000, est salué par une partie de la population comme l’homme ayant combattu avec succès le Sentier lumineux. Mais il purge désormais une peine de 25 ans de prison pour avoir commandité deux massacres perpétrés par un escadron de la mort en 1991-1992, dans le cadre de la lutte contre cette guérilla. 

Le bilan de l’ex-mandataire de 77 ans, également reconnu coupable de corruption, continue de diviser les Péruviens et son ombre plane sur la trajectoire de sa fille, à la fois avantagée et desservie par son patronyme. 

“Vous ne pouvez pas juger quelqu’un sur ce que son père a fait”, a défendu Angela Rios, étudiante de 18 ans venue voter dans une école de la capitale péruvienne, sous un ciel nuageux, et se disant persuadée que Mme Fujimori “renforcera l’économie et améliorera l’éducation”. 

– Campagne atypique - 

“Nous voulons un changement: la sécurité pour les citoyens et la sécurité de l’emploi”, a confié, dans le même bureau de vote, Wilfredo Peña, agent de maintenance de 55 ans qui soutient pour sa part l’ex-Premier ministre Pedro Pablo Kuczynski. 

Le trop faible écart, dans les sondages de sortie des urnes, ne permettait pas dimanche soir de départager M. Kuczynski, ancien banquier de Wall Street de 77 ans, et la parlementaire de gauche Veronika Mendoza, psychologue de 35 ans ayant grimpé dans les intentions de vote ces dernières semaines. 

La campagne, atypique, a été marquée par l’application d’une nouvelle loi interdisant, sous peine d’exclusion, la distribution d’argent ou de cadeaux. 

Des 19 candidats inscrits au départ, neuf ont déjà été mis hors jeu ou ont renoncé. L’un d’eux, Gregorio Santos, se présentait même depuis la prison, après avoir été arrêté sur des soupçons de corruption. 

La législation, permettant de disqualifier des candidats jusqu’au jour même du vote, a suscité les critiques de juristes et du secrétaire général de l’Organisation des Etats américains (OEA), Luis Almagro, qui redoutait “une élection semi-démocratique”. 

Celui ou celle qui prendra les rênes du pays à partir du 28 juillet devra faire face à de nombreux défis. 

Un des champions de la croissance en Amérique latine grâce à sa richesse en ressources naturelles (minerais), le Pérou connaît un net ralentissement économique, avec une prévision de croissance pour 2016 de 3%, et souffre d’une pauvreté endémique. C’est aussi l’un des premiers producteurs au monde de cocaïne. 

Mais “l’exaspération ne vient pas tant de l’économie que de la politique, à cause de la corruption”, explique à l’AFP Luis Benavente, directeur de l’institut de sondages Vox Populi. Et “nous sommes arrivés à un tel niveau de débâcle, de chaos, que le pays doit réagir”.                                                                                                       

Crédit photo: Ernesto Benavides

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